on finira toutes à poil

3 juillet 2006 par mauricE

ce titre c’est vraiment du racolage pour que vous lisiez la suite. en fait c’est pas trop drôle, c’est sur le sexe de la mort. c’est de la poésie morbide-prout.

et oui des fois
la vie est une suite de pertes blanches rouges et noires
parfois jaunâtres ou caca marron,
 
le monde, gluant et petit comme une crotte de nez
aseptise tout ce que tu veux,
ta conscience muqueuse javelle
le frottement du rêve/réalité/rêve/réalité
ce n’en sera pas moins violent au fond
de ta culotte le cycle de nos passages ici bas
 
la mort est un processus palpable
pour qui lève la jupe des apparences
la mort est processus palpable
avec un rythme saccadé
le rythme du (cyber)sexe,
ou d’une autoroute sous la lune
 
vite vite vite prends Ton temps
pas celui qu’on te prépare si fonctionnel
c’est si sensible les micro-ondes
mange tes morts et les têtes raides c’est du réchauffé
 
la mort est un processus administré par l’Etat,
maquereau institutionnel tout puissant,
qui gère et crée (de) la violence
administration de la mort
hôpital hôpital hôpital
naît dedans, meurt dedans
c’est tellement plus propre
que les cadavres de l’autre monde à la télé
crottes de nez sous le canapé ou au volant
morts pour l’ordre moral le long de la route du travail
‘torture mentale physique névrose’
fille de ... l’Etat
et tu peux bien crever à te battre contre ça !
lobotomie auto-infligée,
mange tes morts c’est du réchauffé
 
la mort est un silence et une réalité
comme le vagin : on en parle pas quand ça va bien,
et à peine quand ça va mal et pour mieux taire,
cacher des cons cernés, diriger.
administrer.
 
la mort a un uniforme sexy noir, ou blanc, toujours trop court.
la mort est l’Amante Suprême
la violeuse de tous les recoins
au coin de la rue et plus souvent encore si près de toi
elle sait prendre le temps
et quand elle est là elle s’installe
pour asseoir son immense pouvoir
la mort est totalitaire et pourtant on peut prendre plaisir à son contact
jusqu’à s’y brûler les ailes
il y a n’y a que les monstres qui le savent
bien au delà de l’icône "tête de mort"
 
sa jalousie exclusive est son combat
même si personne n’en est exclu en fait
elle gagne toujours à la fin
perdu d’avance pour qui s’y oppose
gagné un peu de répit
que finalement elle emporte avec Elle
vivre avec Elle, la mante religieuse
vivre avec son amour de bourreau
tortionnaire savoureuse, tyran sans limite
qui étend son domaine dans le corps, dans la tête, dans le temps, dans le lit, dans tous les actes, toutes
les paroles...
la reconnaître dans la dissymétrie des détails
dans les plis, les rides des yeux
la trouver belle sur le sable
dans le départ des unes des autres
l’absence
la reconnaître jours après jours et la dire,
illégitime.
la haïr est un mot faible
et l’aimer pour prendre ce qu’il reste
les miettes rétrécissent,
le corps décharné,
le cerveau grignoté,
après happé
son appétit vorace dévore les possibles
qui s’amenuisent s’amenuisent et s’intensifient s’intensifient à la fois
à la hauteur de tes cernes
jusqu’à ce qu’il ne reste rien du plaisir
mémoire trouée
que le souvenir et la douleur de l’injustice sans cesse répétée.
et alors ?
 
alors je sens son arme charnelle,
la plus pernicieuse et la plus forte
celle de prévenir de son Imminence
si longtemps à l’avance,
de construire son Empire
muscle par muscle
alvéole par alvéole
neurone par neurone
et de rendre impossible par là même le voile habituel
la vie de tous les jours, sans Elle.
 
de n’être pas en fait
ni évènement, ni absence
mais processus, présence
le quotidien de la disparition
tous les jours on y pense
dans les corps en fusion
 
vouloir laisser croire qu’on pourrait éviter,
traiter,
résister à ses charmes
là où on ne peut que rentrer dans son jeu.
ne pas jouer avec/contre Elle formate nos œillères,,
tant son empire est en prise directe avec nos actes
avec notre naissance même
le faire semblant c’est du sanglant
quand on sent que rien n’est innocent.
 
innocente je ne le suis pas plus
et regarder ailleurs m’est impossible tant est grande la tentation de sentir
 
que l’on y peut quelque chose : vivre bordel !
 
alors je la regarde partout
de biais dans les orteils
je la masse pour qu’elle sente ma force et ma chaleur
pendant que j’en avais
 
et puis la lassitude
et puis l’épuisement
toute petite petite petite
goutte de trop
 
dégage !
des gages !
 
ben oui que je triche.
tricher c’est jouer.
je joue.
et rien à gagner,
rien à perdre, sauf moi.
je triche alors cours après moi,
joue avec moi,
joue contre moi.
moite contre-jour.
joue contre joue.
jouer veut pas dire jouer à se perdre
"t’es perdu-e ou tu te perds ? je m’y perds",
jouer à se rattraper l’un à l’autre,
là où on peut se faire mal.
s’arrêter avant de tomber
 
jouer à se guider dans les décombres
quand on a trouvé une piste
une piste pour aller quelque part,
un endroit de l’esprit
un non-lieu de nos corps
où on était pas encore allées, ou pas assez.
joue avec moi !
joue contre moi !
moite contre-jour
joue contre joue...
 
celles qui cohabitent avec l’Amante Suprême
 
sont comme tous les zombis conscients de l’être :
seules
silencieuses
et rampantes dans l’ombre des vivants
ces innocents bâtards si gentils
et tellement moins humains que mon robot mixer
 
je pars
 
je ne cherche pas à comprendre
ni l’Amante Suprême ni son troupeau de fonctionnaires
ni le reste d’ailleurs
je cherche simplement à vivre
et je réserve mes forces en plus pour celles que je sens
vivre bonus tout ce que je peux pour pouvoir mourir
et sans prétention de pouvoir quelque chose contre Elle
 
et si je l’humanise la Mort
alors que tout meurt de gré ou de force
c’est que j’ai une affection particulière pour l’espèce humaine
si douée à feindre de l’ignorer pour mieux la répandre
et probablement même ça se profile
par son voile atomique
détruire le souvenir même de quoique ce soit
 
et si je la féminise la Mort
alors qu’elle est si bien administrée par la société des hommes civilisés
(qu’elle peut très bien rester un concept pour le commun des mortels
jusque dans leur lit de mort)
c’est que j’ai une affection particulière pour les femmes
si douées à feindre d’ignorer la domination des hommes
pour mieux répandre leur empire en elles
et -ça fait plus que se profiler depuis longtemps-
se faire accaparer leurs propres mortes.
 
on ne se laisse même plus les pleurer ensemble !
 
la Mort pourtant avant de devenir le seul avenir palpable
l’avenir des vivants administrés par les hommes
n’était, je vous le dit, que palpable partout.
processus sans raison, logique de la vie même.
 
l’Amante Suprême sans autre dessein ni charme ni stratégie,
que continuité et connexion entre les êtres et les mondes.
 
que ces mots soient comme des claques
pour que tu regardes ton sang entre tes jambes
tu le touches tu le sentes sur tes doigts
et tu écrives avec, dans ta langue sur le mur
 
"je veux mourir et (d’abord) je veux vivre"