Du côté des moches

18 mai 2012 par Tchak

Comment sait-on qu’on parle « du côté des moches » ?

Quand les mecs bourrés (ou pas) se permettent de vous dire que vous seriez la seule femme sur une île déserte, ils ne prendraient pas la peine de vous courir derrière (pfff, tu parles ! quand on ne m’insulte pas on m’emmerde pareil que les jolies filles dans la rue, et puis moi je sais ce que c’est d’être sur une île déserte au milieu d’un océan de connards et j’ai encore jamais cédé à la « tentation »).
Quand vos amis mâles commentent les jolies filles qui passent sans penser que vous êtes là et que vous trouvez ça grossier, puisque c’est comme ça que vous comprenez que vous êtes hors-jeu.
Quand vous recevez des avances uniquement en fin de soirée, quand tout a été fait pour s’assurer les faveurs des filles du haut du panier et qu’il est temps de tenter la dernière chance avec ce qui reste.
Quand vos amies vous disent que non, c’est pas comme ça que ça se passe, qu’il n’y a pas de hiérarchie entre les personnes, et que vous ne devriez pas être aussi dure avec cet apollon de 1,50 m affligé d’un bec de lièvre (qui vous a repérée aux alentours d’1h du mat’).

« Moche », ça ne veut pas dire que vos traits ne sont pas délicats et harmonieux, mais que vous ne vous n’avez pas adopté tout un code autrement plus contraignant que celui des tribus qui ont une vie amoureuse moins complexe : vêtements inconfortables et qui entravent les mouvements, trop légers en hiver, pas assez solides avec leurs fibres synthétiques.
Ça veut dire qu’en ne souriant pas (ou pas assez, parce qu’il faut aux grosses un sourire XXL, à la mesure de leurs fesses, pour compenser le stigmate), vous avez l’air d’une chieuse. Masculin de chieuse : « individu doté d’une intense vie intérieure » ; la hiérarchie descendante hommes – femmes – grosses est doublée d’une échelle de contraintes qui est, elle, ascendante.
Ça veut dire au final que avez oublié de signaler votre disponibilité sexuelle. Et on ne se privera jamais, des amies soucieuses de votre bien-être aux prédateurs qui ne sont intéressés que par le leur, de vous le faire comprendre.

Post-scriptum

Cet article résume vingt ans de vie « du côté des moches ». Ça peut avoir l’air rude, mais étalé sur vingt ans, ça passe...

NB : L’expression est à mettre au crédit de Virginie Despentes, elle inaugure King-Kong Théorie, Grasset, 2006.